Centième article de ce blog. Cinq-cent-trente-cinquième article zizanesque. Il y a un moment où il faut s'arrêter de compter.

Ce n'est pas parce qu'on ne m'entend pas que je ne parle pas. Ce vieux mythe de l'éducateur qui met des claques dans le dos.
En réalité, j'en ai assez de cette position bâtarde. Tu es censée prendre des responsabilités, mais faudrait voir à ne pas piquer la place de ta référente de stage. Et puis, faut qu'on te voit faire, sinon ça vaut pas. De toute façon, tu es là pour être jugée. Tu n'es qu'une étudiante, tu as encore tout à apprendre. Nous, on sait. Tu ne sais pas. Mais tu n'en dis pas assez. Et puis, de toute façon, on a toujours raison, même quand on a tort. Si on annule des rendez-vous, on dira que tu n'es pas venue, et qu'on t'attendait. Que d'ailleurs, ça fait plusieurs fois. Et que tu te pointes quand il ne faut pas. Que le bilan a déjà été fait. Ou qu'on reporte encore, parce que de toute façon, y'a plus important. On pourra toujours te glisser entre deux portes ce qui ne va pas. Sans rien mettre derrière. Pas d'exemple. Pas de conseils. Juste ce qui ne va pas. Mais tu le sais, de toute façon. Et puis surtout, on ne te voit pas éduc'. Parce que t'es pas là à babeler tout le temps. A en mettre plein la vue.

Et c'est la crue. Là, au milieu du couloir. Sous les regards pleins de pitié. Et les questions insistantes. Mais bordel, je t'avais dit que j'en parlerai plus tard. Ça fait mont. Je ne maitrise plus rien.

J'en ai assez de rendre des comptes. Ça ne me ressemble pas. Je n'ai pas envie de passer des journées supervisées. Je n'ai pas envie de demander l'autorisation. Je n'ai pas envie qu'on me dise que je n'ai pas le droit. Je n'ai pas envie qu'on ait quelque chose à en dire. Rentrer dans les petites cases. Les heures de boulot. La vie de famille. Les dimanches chez les parents. Les vacances organisées. Et les collègues pour tout raconter. Et dire du mal de la direction, entre deux. Faire grève une fois de temps en temps, parce que sinon, ça se voit sur la fiche de paye. Et comme on ne travaille que pour ses congés.
Ce n'est tellement pas ce à quoi j'aspire. Et pas parce que j'suis trop une rebelle. Parce que j'aime pouvoir fêter mes dix-sept ans chaque année. J'aime que les choses soient improvisées. J'aime me laisser porter par la vie. Pas par les normes. Ça ne m'empêche pas de me réjouir pour les autres. De leur vie de famille et de leurs vacances au soleil. J'aimerais juste qu'on me laisse mener la mienne comme je l'entends. Et surtout, sans émettre d'avis.
Arrêtez de vouloir tout psychologiser. D'appliquer vos grandes théories sur tout et n'importe quoi. Ce n'est pas parce que j'en parle pas que je suis célibataire. Ce n'est pas parce que je suis avec Ava Adore que je suis lesbienne. Ce n'est pas parce que je ne suis pas lesbienne que je n'assume pas. Je peux l'être, si ça vous fait plaisir. Je m'en fiche. Ce n'est pas parce qu'il y a toujours Tarabas en filigrane dans mon crâne que je veux absolument être hétéro. D'abord je ne le suis pas, ensuite je n'ai jamais dit que je l'étais. En fait, qu'est-ce que ça peut vous foutre ? Et ce n'est pas parce que là, je suis avec une fille, que je suis attirée par toutes les filles et que j'ai envie de sauter sur les copines. Et non, je n'ai pas envie d'essayer de t'embrasser. C'est bon, arrête de chialer, ça veut pas dire que t'es moche. Et arrête de répéter que personne ne veut de toi.

Il faut que je tienne. Jusqu'au diplôme. Pour enfin terminer quelque chose. Pour relever le challenge que je me suis fixé. Parce que j'en ai marre d'avoir pour ombre une image de fille qui n'est pas capable d'aller jusqu'au bout. Ce n'est pas eux qui me diront qui je suis. Je sais ce que je vaux. Plus qu'une évaluation de stage ou quelques partiels. Je ne suis pas en compétition avec toi. Tu peux toujours brailler à qui veut l'entendre que cette fois, c'est toi la major de promo. J'ai déjà bien à faire avec mes démons. Ce sont des adversaires à la hauteur.