Inutile de chercher à comprendre. Pourquoi. Depuis la mort d'Amy Winehouse, j'écoute Britney Spears à fond les enceintes. C'est tout à fait cohérent. Autant que le vert fluo de mes ongles va si bien avec le violacé de mon orteil cassé. La Zizanie fait ce qu'elle peut pour remplir l'intérieur de sa boite crânienne avec des idées aussi essentielles qu'inoffensives. Ou presque. Elle a quand même perdu un orteil en route. Du coup, elle a du descendre de douze centimètres pour retrouver ses tongs. Tant pis pour la drache. Tant pis pour l'allure.

Love me. Hate me. Say what you want about me.

Voilà. Je recommence à perdre le contrôle. De ce qui passe dans mon gosier. Par conséquent, je me retrouve plusieurs fois par jour, au-dessus de la cuvette des toilettes, les deux doigts au fond de la gorge. Dans peu de temps, je ressemblerai à un hamster. Je n'ai aucune volonté. C'est fou. Même pas capable de me raisonner. C'est toujours le même rituel. Telle une automate, je me dirige vers le supermarché. Je passe de rayons en rayons consciencieusement. Parfois, j'arrive à ne criser qu'avec des aliments faciles à vomir. Je culpabilise un peu moins. Parfois non. Je sais que je vais souffrir, à purger mon chocolat. Mais c'est plus fort que moi. Mon panier se remplit vite. Je passe à la caisse les yeux baissés. Je rentre vite. Je récupère une bouteille d'eau au passage et je m'enferme dans ma chambre. Je ferais mieux de me faire du thé. Mais je suis trop pressée. J'étale tout sur mon lit. J'ouvre les emballages et j'ingurgite. Tout. Sans mâcher. Sans ordre. Du sucré, du salé, du sucré. Peu importe. Jusqu'à ce que je sois prête à éclater. I hate eating. La grenouille qui voulait se faire aussi grosse que le bœuf. Et puis je bois. Je planque tout. Il ne faudrait pas qu'on tombe dessus. Ce serait pire. J'ai déjà tellement honte. Il faut que ça sorte. J'ai des crampes à l'estomac. Mais surtout, j'ai honte. Je m'enferme dans la salle de bain. Je mets la musique à fond. Brit-Brit est une alliée parfaite. J'ouvre le robinet. Tant pis pour la planète. A ce moment-là, ce n'est pas ce qui me préoccupe. Plus rien d'autre ne compte. Je m'enfonce l'index et le majeur au fond de la gorge. Réflexe pharyngé détraqué. C'est parti. Il faut faire au plus vite. Plus rien ne doit rester. Jusqu'à ce que la bile me brûle la gorge. Je nettoie tout. Moi y compris. Il ne faut pas que ça sente. Il ne faut pas qu'on le sache. J'essuie le mascara qui a coulé sur mes joues. Je me lave les dents. Je m'épingle un sourire sur le visage. Et je retourne dans la vraie vie.