Je m'étonnerai toujours de la perfidie sournoise des nanas, lorsqu'elles sont en groupe. Lorsqu'elles se montent la tête. A coups de messes basses, de SMS et de réunions au sommet. Je sais de quoi je cause, j'en ai infiltré un.

En arrivant dans le Grand Nord Hostile, j'avais l'intention et toute la bonne volonté de socialiser. Genre, de parler à des gens. On va commencer par ça. Sauf que. Malheur ! Je me retrouve dans une promo de filles. Dans le travail social, fallait s'y attendre. L'envie de bifurquer vers le BTP m'a traversée l'esprit. Mais j'y ai vite renoncé. J'ai pris une grande respiration et j'ai dit bonjour à la dame. J'avais le choix entre le groupe des « je me mets au dernier rang et je me fais passer des mots pendant les cours » et le groupe des « je peux pas aller boire un verre, faut que je commence à faire mes fiches ». Respire, Zizanie, respire. Moyenne d'âge. Moins de vingt ans. Ça va bien se passer. Malgré moi, je me suis retrouvée à fréquenter les mêmes gens. Les mêmes filles. Malgré moi, j'ai intégré un groupe. Et malgré moi, un peu plus d'un an plus tard, je m'en suis retrouvée exclue. J'ai tenu un an. Et puis, je trouve ça valorisant. De ne pas avoir rempli les critères pour en faire partie. Je ne suis pas comme elles, je n'ai jamais été des leurs. C'est aussi pour ça que, gamine, j'étais un vrai petit garçon manqué. Parce qu'intuitivement, je n'allais pas vers les filles. Mais aussi parce qu'elles ne voulaient pas de moi. Je ne leur inspirais pas confiance. J'ai mis du temps à m'en rendre compte. Quinze, vingt ans. Quand. Je me suis pris leurs coups bas et leur hypocrisie chronique de plein fouet. Je ne m'y attendais pas. Ça m'a fait vraiment mal. Au vu de l'importance que j'accorde à l'amitié. De de que j'y mets. C'était il y a quelques mois. J'ai eu le temps de prendre du recul. Et finalement, je m'en réjouis. Aujourd'hui, j'ai encore du mal à comprendre ce qu'elles cherchent. Elles m'invitent cet été pour l'anniversaire de l'une d'entre elles. Et moi, je me dis que puisqu'on sera amenées à se revoir à la rentrée, autant mettre un peu d'eau dans mon vin. Sacrilège. Bref, j'y vais. Elles prévoient toujours un cadeau commun. Alors je contacte les autres, pour leur proposer de participer. Ben ouais, je me voyais mal être la seule à acheter un truc dans mon coin. Et surtout, j'étais vraiment pas motivée pour prendre le temps de choisir et d'investir pour quelqu'un qui avait perdu toute estime à mes yeux. Elles ont mis une éternité à me donner signe de vie. Peu importe. Toujours est-il que j'ai découvert le cadeau en même temps que la principale intéressée. Un cadre, avec une photo de toute cette super-bande-de-copines-à-la-vie-à-la-mort-et-je-vous-aime-trop-les-filles. Si j'avais pas encore perçu le fossé générationnel entre nous, je ne pouvais plus passer à côté. Évidemment, elles étaient toutes présentes sur la photo. Photo prise au pays des Dacia à l'avant de 206 et des chiens errants. On y était toutes. Là-bas. Sur la photo, elles y étaient toutes. Sans moi. Grands sourires hypocrites et réclamation des sous du pot commun en option. Classe.

Depuis, je me dis que j'ai essayé, que c'était une expérience comme une autre. Mais que plus jamais. Des amies, j'en ai. Ben ouais, tu finis par rencontrer des gens intéressants, à force de socialiser. Des nanas aussi. Mais voilà. On va se boire un verre de temps en temps. Une ambrée pour moi, un Monaco pour elle. Elle a presque honte. On se raconte nos vies sur Facebeurk. On se prévoit des concerts au top de la tendance. Lynda Lemay. Ben quoi ? Quand c'est pas des petits groupes inconnus qui font du bruit, à gros coups de basse. On se fait des expos, on va au ciné. On passe l'après-midi dans un parc. On enchaine les mojitos et les commérages. On se fait des soirées « tous des connards, toutes des salopes » à la vodka-pomme pour moi et au Nutella à la cuillère pour elle. Parfois, on est trois. Voire quatre autour d'une table. Parfois. Une fois tous les cinq ans. Le plus souvent, on se voit à deux. Parce que c'est bien assez d'hormones féminines comme ça. Ou alors, il faut qu'il y ait des mecs pour tempérer. Et puis, une partie de PES est un moyen très sain pour régler ses comptes. Surtout quand je gagne.