Maintenant que je suis lancée, autant que je te raconte la suite. Niveau pudeur, j'suis plus à ça près. Parce que, z'allez me dire. Mais comment ? Comment c'est arrivé ? Lui, fidèle. Toi, distante. Ben oui, c'est vrai ça. C'est plutôt mal barré, comme situation de départ. Surtout que. Quelques secondes avant le moment M de l'instant T. J'étais vautrée sur son canap', enroulée dans mon plaid, tel un sushi flétri, me bidonnant à gorge déployée. Oui, parce que les sitcoms me font vraiment marrer. J'aime rien de plus au monde que de regarder des épisodes les uns à la suite des autres. Je pourrais y passer des nuits entières, sans jamais me lasser. Note aux lecteurs insomniaques : c'est totalement inefficace, comme solution. Si vous voulez dormir, regardez un téléfilm allemand. C'est engageant, hein. Comme début d'épisode de Soupe au lait et cœur d'artichaut. Le soap de ma vie.

Et puis, faut dire que celle devant laquelle j'étais rivée, c'est quand même ma préférée entre toutes. Hilare, j'étais. Sauf qu'à un moment, je n'entendais plus l'écho de mon doux gloussement mélodieux. Ahem. Ouais, parce que Cuillère, il ne se prive pas non plus. Habituellement. Perplexe, je tourne la tête. Et je le vois qui me fixe. Alors j'y vais de mon plus beau « Quoi ? ». Genre « Quoi ? C'était pas drôle ? Je ne te connaissais pas si difficile ! ». Et bam. Avant même que je pense à refermer ma bouche grande ouverte. Oui, je suis extrêmement classe, quand je pouffe, toutes dents dehors. Une dinde, je vous dis. A ça près que les dindes n'ont pas de dents. Passons. Donc, avant même que l'idée ne me traverse l'esprit. J'avais sa langue à l'intérieur. Pas de l'esprit, j'entends. Bizarrement, ça ne me faisait plus rire du tout. On s'est joyeusement galochés. Et fatalement. Joyeusement mélangés. Un moment assez étrange. Parce que d'abord. J'ai l'impression d'avoir baisé dans un paquet de ouate. Et parce qu'ensuite. Moi qui ai tendance à prétexter une envie de fumer pour m'échapper. Après. Ben là, j'ai attrapé mon paquet de clopes, et me suis assise à côté de lui. Et ses ongles effleurant la peau de mon avant-bras, même pas ça me gênait. Parce que dans le genre. Me touche pas, j'ai trop chaud, j'suis toute poisseuse, et puis, on vient de passer un certain temps l'un sur l'autre, on peut bien s'éloigner deux minutes. Hein. J'ai même daigné le laisser se rapprocher. J'ai même daigné le laisser me bécoter. Il a même su me soutirer des infos sur. Mon plan initial. Pourquoi j'avais débarqué. Et surtout, pourquoi maintenant. J'admets. A ce jeu-là, il est fort. Il m'a quand même répondu que j'avais été trop conne. A l'époque. Que s'il avait su que je lui plaisais. Tout ça. Que ça aurait été bien plus simple, d'ailleurs. Parce qu'on ne met pas un terme à une relation de quatre ans, comme ça. Sur la défensive, je lui ai rétorqué que je ne lui demandais rien. Qu'il ne fallait pas qu'il se méprenne sur mes intentions. Que je ne suis pas faite pour les relations sérieuses. Le genre de conneries que je peux débiter quand je me sens vulnérable. Quand je ne domine plus la partie. Bien sûr, il m'a renvoyé la balle. Si je ne lui demandais rien, c'était quoi le but du jeu ? Se le faire pour le voir culpabiliser par rapport à sa nana ? Foutre son couple en l'air, pour le fun ? Il a réussi à m'énerver, forcément. Je me suis braquée. On s'est sauvagement sautés dessus. Eh merde.