Il est là, devant moi. Défoncé. Et en larmes. Je lis la souffrance sur son visage. Alors je le prends dans mes bras, et je le berce en lui caressant les cheveux. Je préviens que j'étranglerai le premier qui me parlera d'instinct maternel. Il ne s'agit pas de ça. De l'amour inconditionnel, rien de plus. Je le serre fort contre moi. Sans m'en rendre compte, je cale mon nez dans son cou et respire l'odeur de sa peau. La mémoire des souvenirs. Des effluves qui me rappellent tout ce que j'aime en lui. Mais voilà. Cette saloperie l'a rendu égoïste, dur, prétentieux, sinistre et lâche. Cette saloperie lui a pris toute sa tendresse et son émerveillement. Les étoiles au coin de ses yeux. Lui, il dit que c'est moi, qu'elle lui a pris. Je ne suis pas d'accord. Qu'il l'arrête pour me récupérer. Je ne veux pas être sa seule motivation. Parce qu'après quoi ? A la moindre dispute, il replonge ? Un équilibre beaucoup trop fragile. Et puis merde, c'est un mec génial. Ça vaut la peine qu'il essaye d'être heureux. Certains diraient, ne serait-ce que pour donner l'exemple. Je veux le voir rayonner, sourire, avoir l'envie et l'énergie de déplacer des montagnes. S'il faut, je serai là. Pour lui rappeler toutes les merveilleuses choses dont il est capable. Tout seul. Sans elle. Pour notre histoire, sans doute que c'est déjà deux ans trop tard. Pour son histoire à lui, c'est le moment où jamais. Arrête de t'abîmer, mon amour. Arrête de jouer l'équilibriste sur une ligne blanche, en plein milieu de l'autoroute. Je ne te l'ai jamais demandé de t'en passer. Parce que je savais bien que ça ne servirait à rien. C'est pas comme ça qu'on arrête. C'est pas pour un autre que soi. Si tu m'avais demandé d'arrêter mes crises de boulimie, j'en aurais été incapable. Parce que l'addiction devient tellement présente dans ta vie, que tu es persuadée que tout s'écroulerait, si elle n'était pas là. Il faut d'abord renforcer la structure, construire de nouveaux piliers. Tiens, regarde, je te tends la première brique.