Bon, bon, bon. J'vais finir par l'admettre. Si je me sens aussi impuissante, face à la situation avec Robin, c'est parce que Tarabas n'est plus là. Parce que Tarabas, il aurait pu parler à Robin, lui. On aurait trouvé une solution ensemble.

Tarabas manque à ma vie. Tarabas manque à ma peau. Tarabas manque à mes projets. Tarabas manque à l'air que je respire.

Je suis dans un état de fatigue extrême, j'ai des nausées, j'ai des haut-le-cœur à la moindre odeur, j'ai la poitrine douloureuse au point où le port du soutien-gorge est devenu insupportable, je n'ai pas mes règles depuis plus de deux mois.
Et je ne suis pas enceinte. Tu penses bien, j'ai vérifié. Plutôt deux fois qu'une. Bonjour, je voudrais faire un dosage de béta-hCG. Non, je n'ai pas d'ordonnance. Non, je n'ai pas de médecin traitant. Et non, si je suis enceinte, je n'ai pas envie de « faire suivre ma grossesse ». Je veux juste que tu prennes mon sang et mes sous et que tu me dises si oui ou non j'ai un bulbe d'être humain planté dans mon utérus. Merci, au revoir.
C'est non, donc. Génial, mon corps me fait une blague. Mon corps a un humour un peu limite, j'trouve. Surtout que c'est pas parce que j'ai lu le papier du labo qu'il a cessé son cirque. Hey ! On ne t'a jamais dit que les blagues les plus courtes étaient les meilleures ?

Voilà. Après avoir braillé à qui voulait l'entendre que je gérais la sortie de ma vie de Tarabas. Mon corps somatise. C'est pas comme si c'était nouveau. Mais d'habitude, j'ai le dos bloqué. Je préférais avoir le dos bloqué. Ça ne ferait pas des nœuds dans mon cerveau. Je n'aurais pas besoin de me poser des questions qui ne servent à rien. Sinon à me faire souffrir et à m'embrouiller encore plus. Oui, je suis sûre de ne pas vouloir d'enfant. Et je suis sûre de ne pas en vouloir avec Tarabas. Parce que ce n'est pas un caprice. Parce que je sais exactement pourquoi j'ai pris cette décision, et que chaque jour qui passe me conforte un peu plus. Ce serait beaucoup plus simple pour moi d'en faire un. Vraiment beaucoup plus simple. Sauf que. La facilité n'est pas une option envisageable lorsqu'elle a des conséquences sur un être qui n'a pas demandé à vivre. Et que moi, si on m'avait donné le choix, j'aurais refusé qu'on me mette au monde.

Donc, non. En parler à Tarabas n'est pas une solution. Parce que je suis capable d'anticiper sa réaction. Et que ça ne nous mènera à rien. Ni lui, ni moi.

Il n'y a plus qu'à me montrer assez convaincante pour que mon corps arrête de faire son intéressant. Et faire une cure de magnésium. Parce j'crois que j'ai épuisé toutes mes réserves, à coups de stress et de fatigue. Les crampes de la mâchoire, ça fait vachement mal.