« En fait, vous êtes asociale ! »
Pas vraiment asociale... Ah si, en fait.

Je suis bien plus heureuse seule qu'accompagnée. Même bien accompagnée. Je ne me sens jamais bien accompagnée. Les autres compliquent tout. Iels me demandent un effort constant. Je dois faire avec leurs exigences et leurs limites. Je dois comprendre leurs codes. Et les suivre. Un tout petit peu, au moins. Je dois m'y adapter. Iels m'empêchent de faire ce que je veux au moment où je le veux et comme je le veux. Iels me stressent. Me bousculent. Me mettent la pression. Consciemment ou non. Volontairement ou non. Ou j'imagine que je dois faire tout ça. Mon imagination et mes croyances limitantes. Ce putain de psychisme.
Je suis bien seule. Je suis bien en ma propre compagnie. Je ne m'ennuie jamais lorsque je suis seule. Je m'ennuie lorsque je suis avec d'autres personnes. Je trouve facilement mon équilibre seule. Alors que les autres rompent l'homéostasie. La sérénité. Le bien-être.

J'ai besoin des autres. Pour me rassurer. Pour me tenir la main. Parce que j'ai peur de prendre des décisions. Parce que j'ai peur de ne pas prendre les bonnes. J'ai peur de prendre des responsabilités et de me tromper. J'ai peur de mal faire. D'échouer. D'être nulle.

J'angoisse à cause des autres. J'angoisse sans les autres.

J'aime les autres. De loin.

J'ai peur du système. Je le rejette parce qu'il me fait peur. Parce que je le trouve stupide, aussi. Par rébellion. Mais avant tout parce qu'il me fait peur. Je ne sais pas pourquoi il me fait aussi peur. C'est l'origine de mes blocages. J'ai peur de ce que je ne maîtrise pas. J'ai peur de me faire engluer dans une toile. J'ai peur de ne plus être maîtresse de mon monde.

Ça m'arrange bien. Je verrouille tout, et je reste immobile. C'est confortable, l'inertie. C'est confortable et inconfortable à la fois. Parce que ça me rend malheureuse. Mais ça ne me confronte pas à l'échec. Aux responsabilités.  Aux risques. A la douleur. J'ai tellement peur de l'échec que je me mets d'emblée en position d'échec. Je suis douée pour ne rien faire.

J'en ai assez. Je veux prendre des décisions seule. Faire les choses pour moi.

« Pour vous. »
Pour moi.
« Non, non, pas avec cette petite voix timide. Pour VOUS. »

Comprendre : sans enjeu social.

J'ai toujours besoin d'un.e accompagnateur.rice. D'un.e professeur.e. D'une mère. Qui me tient la main. Qui me rassure. Qui me guide. Qui m'encourage.
Alors qu'en vrai quand je fais les choses seules, je me débrouille pas si mal. Plutôt bien. Mieux.

En vrai, ce meuble, je pourrais le fabriquer seule.
En vrai, ce solfège, je pourrais m'y coller seule.
En vrai, quitter Paris, je n'ai besoin de personne d'autre pour y arriver.

En vrai, si j'ai aussi peur de conduire, c'est parce qu'il n'y a pas pire situation où il faut prendre seule des décisions qui impactent les autres. Et moi. Le monde entier. Rien que ça.
En vrai, si je refuse d'être adulte. Et tout ce que ça incombe. Être adulte, c'est décider. C'est parce que j'en ai peur. Et si j'en ai peur, c'est parce que je m'en sens pas capable.

Même si.
Si je suis aussi dure. Si je ne pleure pas aux enterrements. Si je ne me plains pas quand je suis malade. Ou quand je me fais mal. Si je me mets en danger. C'est pour faire mentir Pygmalion. Effet, de son prénom.