J'écris, j'écris, j'écris. Pour ne surtout pas penser. C'est un tampon émotionnel comme un autre. Je passe de l'un à l'autre en continu. Tout en essayant d'aller mieux. Écrire, c'est un moindre mal. Et puisque j'ai retrouvé le chemin de ce blog, je l'utilise. Je déborde de mes propres émotions, je ne peux plus recevoir celles des autres. Il faut bien que je déverse les miennes quelques part. Que je les vidange.

Sirius et moi arrivons au terme de notre aventure amoureuse.
Ça fait un moment que je vis assez mal la distance. Enfin, pas la distance en elle-même, mais le manque d'occasions de se voir. Le manque de spontanéité, surtout. En réalité, je suis juste épuisée émotionnellement et je ne suis plus du tout en mesure de gérer ma frustration dans ce domaine-là en plus de tous les autres. Je me sens constamment frustrée de ne pas réussir à faire ce que j'aimerais parce que tout est source d'angoisse. Tout ce qui implique de sortir de mon lit me met dans un état d'anxiété profonde. Hello Jojo-le-drama.

J'ai fini par prendre une décision. Et lui en faire part. Il. Sirius, hein, pas Jojo-le-drama. M'a demandé d'attendre un peu. De prendre une semaine ou deux pour réfléchir. J'ai accepté. Parce que ce n'était pas lui que je voulais quitter, seulement les conditions de notre relation. Les émotions liées à notre relation. Et c'est surtout que je n'étais plus tout à fait capable de prendre une décision. Ou plutôt plus tout à fait capable de lutter pour l'imposer.

Evidemment, pendant ce temps, W a décidé de me prouver que c'était vraiment terminé. W, elle n'aime pas les situations tièdes. Pour W, il n'y a jamais de juste milieu. Si c'est fini, c'est fini, on passe à autre chose et basta. W, elle plutonise à mort ma vie, tu vois.

Je suis allée passer le week-end chez un ami pour fêter ses fiançailles. Si ce n'était pas pour lui, je ne l'aurais jamais fait. Vraiment. C'est la pire idée que j'ai eue. J'ai failli mourir. D'être avec tous ces gens, alors que je n'en connaissais pas les trois-quarts. D'être avec tous ces gens tout court. Je n'aime pas les gens. J'ai eu envie de tout cramer cinq-six fois. Par heure. Mais je me suis retenue. Après tout, résister deux jours sans tuer personne était encore à ma portée. J'avais déjà commencé à dissocier, mais j'avais encore le contrôle de tout ça. Pas encore de larmes incompréhensibles. Juste des absences pendant les discussions.

« Ground control to Major Tom » ou l'histoire de mes dissociations. Je suis capable, lorsque je suis dissociée, de m'engager sur une activité, puis quand je reviens dans mon corps, de répondre « bah non, j'ai jamais dit ça ». Alors si, je me souviens que je l'ai dit, mais c'est comme si c'était quelqu'un d'autre, comme si ce n'était pas moi qui l'avais dit. Mes proches me disent lunatique principalement à cause de ce type de réactions. En vrai, cette décision, je ne l'ai pas prise, ce n'était pas moi, j'en avais rien à faire de votre conversation, je veux me retrouver seule, laissez-moi tranquille. Foutez-moi la paix.
Décarre tes troupes de chez moi ou je crame ton pays, c'est assez simple comme vocabulaire, ça ?

Et je ne parle pas de la déréalisation par ennui ou quand je suis fatiguée. Même si, évidemment, je déréalise plus souvent encore lorsque je suis fatiguée. Je sais très bien ce qui me fait dissocier, à ce moment-là, ce sont les attentes des autres. Parce que ça me fait exactement la même chose avec ma cheffe, quand elle me détaille le menu du jour et la liste des tâches qu'elle me demande d'exécuter. Je dois faire un effort titanesque pour m'ancrer et, une fois sur deux, j'ai perdu la moitié des informations. Je le sens bien, ce que je ressens lorsqu'elle me pose sa question purement rhétorique « on fait un point ? ». C'est vraiment très différent du moment où je me barre dans mon monde intérieur parce que j'en ai rien à foutre de ce qu'elle me raconte sur son week-end avec son mec et ses gosses.

J'ai un sentiment de panique qui m'envahit à chaque fois qu'on attend quelque chose de moi. Là, c'est clairement Matilda qui se manifeste. Matilda, c'est une enfant complètement paniquée par le monde qui lui échappe. Par les adultes qu'elle ne comprend pas. Les autres. Qui la tyranisent. Et la forcent à rentrer dans le moule de l'école. Du travail, en l'occurrence. Matilda, c'est celle qu'on protège derrière une épaisse muraille construite en piles de livres. Matilda, c'est celle qui a créé les premiers mondes intérieurs, je crois. C'est l'une des premières, ou la première que je (re)connaisse, à s'être barrée loin, très très loin. On pourrait développer sur le sujet, mais je n'y suis pas prête, maintenant. Matilda, c'est clairement une part vulnérable, une « exilée ». J'ai beaucoup de mal à lui parler. Matilda, lorsqu'elle finit par se manifester, c'est que ses protecteurs sont épuisés et à bout de forces. Et, lorsqu'elle se manifeste, c'est bien souvent avec des gros sanglots. De préférence dans des endroits inappropriés : lors d'un rendez-vous à la banque ou en pleine réunion de travail. Si, c'est arrivé. Les deux. Et à aucun moment je n'ai pensé que mes parts protectrices allaient céder. T'inquiète, je gère. Non, je ne gère plus grand chose. Matilda, elle a la maturité émotionnelle d'une enfant de six ans. Une enfant qu'on vient de parachuter en cours d'année dans la classe supérieure et qui est complètement perdue. Alors, Matilda, elle fait bien comme elle peut. Hello, Matilda, tu vois, je suis revenue vers toi. Je t'ai vue, je sais que tu existes. Promis, un jour, je prendrai le temps de t'écouter.

Bon, à l'origine, j'voulais raconter ce qu'il s'est passé ce week-end-là, mais j'ai déjà trop parlé. On verra une autre fois. Je vais essayer de dormir pour ne pas commencer ma semaine déjà épuisée. Je crois que c'est trop tard.